26 mars 2016

L'époque des mots : Brassens, Ferré, Brel

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Léo Ferré, à l'Olympia (1972) : 

  • Ne Chantez pas la mort
  • La Mémoire et la mer
  • La Solitude
  • Avec le temps
  • La Violence et l'ennui
  • Texte archive : Léo Ferré



Ne chantez pas la Mort, c'est un sujet morbide
Le mot seul jette un froid, aussitôt qu'il est dit
Les gens du "show-business" vous prédiront le "bide"
C'est un sujet tabou... Pour poète maudit
La Mort!
La Mort!
Je la chante et, dès lors, miracle des voyelles
Il semble que la Mort est la soeur de l'amour
La Mort qui nous attend, l'amour que l'on appelle
Et si lui ne vient pas, elle viendra toujours
La Mort
La Mort...

La mienne n'aura pas, comme dans le Larousse
Un squelette, un linceul, dans la main une faux
Mais, fille de vingt ans à chevelure rousse
En voile de mariée, elle aura ce qu'il faut
La Mort
La Mort...

De grands yeux d'océan, une voix d'ingénue
Un sourire d'enfant sur des lèvres carmin
Douce, elle apaisera sur sa poitrine nue
Mes paupières brûlées, ma gueule en parchemin
La Mort
La Mort...

"Requiem" de Mozart et non "Danse Macabre"
(Pauvre valse musette au musée de Saint-Saëns!)
La Mort c'est la beauté, c'est l'éclair vif du sabre
C'est le doux penthotal de l'esprit et des sens
La Mort
La Mort...
Et n'allez pas confondre et l'effet et la cause
La Mort est délivrance, elle sait que le Temps
Quotidiennement nous vole quelque chose
La poignée de cheveux et l'ivoire des dents
La Mort
La Mort...

Elle est Euthanasie, la suprême infirmière
Elle survient, à temps, pour arrêter ce jeu
Près du soldat blessé dans la boue des rizières
Chez le vieillard glacé dans la chambre sans feu
La Mort
La Mort...
Le Temps, c'est le tic-tac monstrueux de la montre
La Mort, c'est l'infini dans son éternité
Mais qu'advient-il de ceux qui vont à sa rencontre?
Comme on gagne sa vie, nous faut-il mériter
La Mort
La Mort...

La Mort?...


 

"La marée, je l'ai dans le cœur 
Qui me remonte comme un signe 
Je meurs de ma petite soeur, de mon enfance et de mon cygne 
Un bateau, ça dépend comment 
On l'arrime au port de justesse 
Il pleure de mon firmament 
Des années lumières et j'en laisse 
Je suis le fantôme jersey 
Celui qui vient les soirs de frime 
Te lancer la brume en baiser 
Et te ramasser dans ses rimes 
Comme le trémail de juillet 
Où luisait le loup solitaire 
Celui que je voyais briller 
Aux doigts du sable de la terre 

Rappelle-toi ce chien de mer 
Que nous libérions sur parole 
Et qui gueule dans le désert 
Des goémons de nécropole 

Je suis sûr que la vie est là 
Avec ses poumons de flanelle 
Quand il pleure de ces temps-là 
Le froid tout gris qui nous appelle 
Je me souviens des soirs là-bas 
Et des sprints gagnés sur l'écume 
Cette bave des chevaux ras 
Au ras des rocs qui se consument 
Ô l'ange des plaisirs perdus 
Ô rumeurs d'une autre habitude 
Mes désirs dès lors ne sont plus 
Qu'un chagrin de ma solitude 

Et le diable des soirs conquis 
Avec ses pâleurs de rescousse 
Et le squale des paradis 
Dans le matin mouillé de mousse 
Reviens fille verte des fjords 
Reviens violon des violonades 
Dans le port fanfare les cors 
Pour le retour des camarades 
Ô parfum rare des salants 
Dans le poivre feu des gerçures 
Quand j'allais, géométrisant, 
Mon âme au creux de ta blessure 
Dans le désordre de ton cul 
Poissé dans des draps d'aube fine 
Je voyais un vitrail de plus, 
Et toi fille verte, mon spleen 

Les coquillages figurant 
Sous les sunlights cassés liquides 
Jouent de la castagnette tant 
Qu'on dirait l'Espagne livide 
Dieux des granits, ayez pitié 
De leur vocation de parure 
Quand le couteau vient s'immiscer 
Dans leur castagnette figure 
Et je voyais ce qu'on pressent 
Quand on pressent l'entrevoyure 
Entre les persiennes du sang 
Et que les globules figurent 
Une mathématique bleue, 
Dans cette mer jamais étale 
D'où me remonte peu à peu 
Cette mémoire des étoiles 

Cette rumeur qui vient de là 
Sous l'arc copain où je m'aveugle 
Ces mains qui me font du fla-fla 
Ces mains ruminantes qui meuglent 
Cette rumeur me suit longtemps 
Comme un mendiant sous l'anathème 
Comme l'ombre qui perd son temps 
À dessiner mon théorème 
Et sur mon maquillage roux 
S'en vient battre comme une porte 
Cette rumeur qui va debout 
Dans la rue, aux musiques mortes 
C'est fini, la mer, c'est fini 
Sur la plage, le sable bêle 
Comme des moutons d'infini... 
Quand la mer bergère m'appelle"

 

Je suis d´un autre pays que le vôtre, d´une autre quartier, d´une autre solitude. 

Je m´invente aujourd´hui des chemins de traverse. Je ne suis plus de chez vous. J´attends des mutants. 

Biologiquement, je m´arrange avec l´idée que je me fais de la biologie : je pisse, j´éjacule, je pleure. 

Il est de toute première instance que nous façonnions nos idées comme s´il s´agissait d´objets manufacturés. 

Je suis prêt à vous procurer les moules. Mais... 

La solitude... 

La solitude... 



Les moules sont d´une texture nouvelle, je vous avertis. Ils ont été coulés demain matin. 

Si vous n´avez pas, dès ce jour, le sentiment relatif de votre durée, il est inutile de vous transmettre, il est inutile de regarder devant vous car devant c´est derrière, la nuit c´est le jour. Et... 

La solitude... 

La solitude... 
La solitude... 

Il est de toute première instance que les laveries automatiques, au coin des rues, soient aussi imperturbables que les feux d´arrêt ou de voie libre. 
Les flics du détersif vous indiqueront la case où il vous sera loisible de laver ce que vous croyez être votre conscience et qui n´est qu´une dépendance de l´ordinateur neurophile qui vous sert de cerveau. Et pourtant... 
La solitude... 
La solitude! 

Le désespoir est une forme supérieure de la critique. Pour le moment, nous l´appellerons "bonheur", les mots que vous employez n´étant plus "les mots" mais une sorte de conduit à travers lequel les analphabètes se font bonne conscience. Mais... 

La solitude... La solitude... 
La solitude, la solitude, la solitude... 
La solitude! 

Le Code Civil, nous en parlerons plus tard. Pour le moment, je voudrais codifier l´incodifiable. Je voudrais mesurer vos danaïdes démocraties. Je voudrais m´insérer dans le vide absolu et devenir le non-dit, le non-avenu, le non-vierge par manque de lucidité...

La lucidité se tient dans mon froc! 
Dans mon froc!




Avec le temps...

Avec le temps, va, tout s'en va
On oublie le visage et l'on oublie la voix
Le coeur, quand ça bat plus, c'est pas la peine d'aller
Chercher plus loin, faut laisser faire et c'est très bien

Avec le temps...

Avec le temps, va, tout s'en va
L'autre qu'on adorait, qu'on cherchait sous la pluie
L'autre qu'on devinait au détour d'un regard
Entre les mots, entre les lignes et sous le fard
D'un serment maquillé qui s'en va faire sa nuit
Avec le temps tout s'évanouit

Avec le temps...

Avec le temps, va, tout s'en va
Même les plus chouettes souvenirs ça t'as une de ces gueules
A la Galerie je farfouille dans les rayons de la mort
Le samedi soir quand la tendresse s'en va tout seule

Avec le temps...

Avec le temps, va, tout s'en va
L'autre à qui l'on croyait pour un rhume, pour un rien
L'autre à qui l'on donnait du vent et des bijoux
Pour qui l'on eût vendu son âme pour quelques sous
Devant quoi l'on se traînait comme traînent les chiens
Avec le temps, va, tout va bien

Avec le temps...

Avec le temps, va, tout s'en va
On oublie les passions et l'on oublie les voix
Qui vous disaient tout bas les mots des pauvres gens
Ne rentre pas trop tard, surtout ne prends pas froid

Avec le temps...

Avec le temps, va, tout s'en va
Et l'on se sent blanchi comme un cheval fourbu
Et l'on se sent glacé dans un lit de hasard
Et l'on se sent tout seul peut-être mais peinard
Et l'on se sent floué par les années perdues
Alors vraiment
Avec le temps on n'aime plus.




"J'ai longtemps cherché l'almanach que ma mère cachait dans l'armoire aux crêpes de la Chandeleur, crêpes farcies de louis d'or et qui - maman le prétendait - nous feraient de l'argent pour toute l'année. Cet almanach où étaient consignées mes vies antérieures, je l'ai ouvert quelquefois dans les arbres immolés, sous leurs gerçures gonflées, dans les rues des villes mortes, la nuit, sur le lisse macadam où luisaient les maisons renversées comme des femmes toutes prêtes, près de la mer, dans les algues reposées, juste avant que n'arrive le flot, au moment où elles vont ne plus respirer et qu'il ne leur reste que des larmes de sel, sous la lampe familière enfin, devant la page qui se salit de ma mémoire, de toutes mes mémoires, au fil tragique de ma machine haletant des équations digitales


Écrire n'est rien. Oser le faire implique cette mémoire multipliée et mille fois anonyme, cette voix du dedans qui est la voix de mille autres voix qui crient derrière les portes de l'absurde, pour quelques-uns, de l'éternité, pour tant d'autres. 

La véritable littérature est impersonnelle et consignée partout, hors les livres. Elle nous vient du silence.



Longtemps, j'ai imaginé que penser était noble. Ne plus penser c'est être Dieu ; c'est froid, et les bibliothèques ne sont pas des frigidaires. Les livres pourrissent ,comme la carne. La syntaxe les indispose et les mots les boursouflent. Il nous faudrait des livres vides, des épures de livres où tous les alphabets invertis de toutes les langues du monde danseraient la Danse devant l'Arche.

Le caraïbe et le sanscrit s'y complémenteraient sous l'oeil cyclope de l'O voyelle de Monsieur Rimbaud. Des phrases pendues, lubriquement, entre deux étoiles du verbe, le participe passé lisant dans les mains du complément d'objet, la préposition écumant à la porte de l'adverbe, Bossuet vissé à Confucius, siamoisement, Aristote, lunettes ouvertes sur la Série Noire, Monsieur Sartre dans un claque avec Bergson, à mesurer le poids de cogitation d'un clitoris tarifié, France-soir à la remorque de l'Ecclésiaste, tout, inversé, maudit, contemporain ou non, les choses renaissant de leurs cendres, le néant remontant à la gorge du temps et vomissant le Néant, tout alors, dans les livres vides, aurait le goût de moi, de ma chair, de ma foudre, de ma graine.


Je n'existe que pour mieux m'extasier devant tout ce que j'invente : Quand je vois un peuplier, c'est moi qui le fais à l'instant même, et il meurt dès que je meurs à lui. Cette femme qui est montée tout à l'heure dans la chambre de son amant, à Chicago, n'y est montée que rétroactivement, à l'instant précis où je le veux, sous le ruban que bat mon clavier, maintenant qu'elle ouvre grands ses ciseaux pour tailler dans mon tissu de chair et d'ombre, et l'ambulance qui passe dans la rue au moment où elle crie n'y est pas passée et n'y passera pas : l'homme blessé ne mourra pas. D'ailleurs, il est indemne. La machine qui lui a volé sa main, à l'usine, n'est pas encore en marche. Quand je le voudrai, le courant lui donnera son sang, à cette admirable machine qui m'obéit beaucoup mieux que je ne m'obéis. Le temps des hommes n'existe pas. Il n'y a de vivace que le temps de ma folie.

J'ai été cheval avec une voix de mezzo-soprano et je n'aimais que le chant grégorien.

J'ai été paquet de cigarettes dans un compartiment de non-fumeurs, à mesurer mes chances. Etre mégot, c'était là ma folie : qu'il reste quelque chose de moi, pas seulement de la fumée, non, un cadavre étiqueté, reconnu. Je suis mégot pour l'éternité. J'ai été source, avec des idées champêtres et les goûts sédentaires... mais les hommes n'ont pas voulu de ma sagesse, ils m'ont engrossée et me voilà perdue dans l'Atlantique, perdue, ridicule, mais vivante. Je m'appelle Source. J'ai été tramway et j'ai sombré dans la ferraille, moi qui n'avais de perche que pour la tendre aux amoureux, au terminus, quand on leur crie justement : Terminus ! J'ai été laine sur un mouton et finis mes jours en un matelas d'un admirable artiste qui fait l'amour deux, trois, dix fois par jour, jamais avec la même femme, toujours avec moi. Au moment où les étoiles ne se comptent plus, tellement il y faudrait de mathématiciens avertis, quand les corps plient sous la rage et que la fille gueule dans la seule langue du monde possible, lorsque s'ouvrent, béantes, les seules portes de secours qui ne grincent jamais, alors je me repose dans ma petite laine.

J'ai été, j'ai été... je suis tout... Je suis toi, passant du boulevard des Italiens, avec la néphrite qui te travaille. Je suis vous, mademoiselle du Café de la Place, vous dont j'invente la jarretière patiemment arrimée ce matin quand, pressée, vous mîtes une pièce de vingt sous pour tendre le bas sur votre jambe frileuse, car le bouton de votre minutieux appareil avait cédé.
Je suis toi, mendiant des supplices, avec ta gamelle à sonnaille. Je suis toi, monsieur le ministre du travail qui sues, la nuit, je ne sais quel humide remords qui te rend fat, précis et malheureux. Je suis toi, soldat-musette, je suis toi, le chien d'aveugle, toi le chien de riche. Je suis aveugle et riche et me crève ce qu'il me reste d' yeux dans la bouche, dans le nez, dans les oreilles et dans les mains... et je ne suis plus qu' un écrivain qui écrit"
Léo Ferré


L'anarchie selon Brassens, Ferré et Brel :


 

Mourir pour des idées, l'idée est excellente
Moi j'ai failli mourir de ne l'avoir pas eu
Car tous ceux qui l'avaient, multitude accablante
En hurlant à la mort me sont tombés dessus
Ils ont su me convaincre et ma muse insolente
Abjurant ses erreurs, se rallie à leur foi
Avec un soupçon de réserve toutefois
Mourrons pour des idées, d'accord, mais de mort lente,
D'accord, mais de mort lente

Jugeant qu'il n'y a pas péril en la demeure
Allons vers l'autre monde en flânant en chemin
Car, à forcer l'allure, il arrive qu'on meure
Pour des idées n'ayant plus cours le lendemain
Or, s'il est une chose amère, désolante
En rendant l'âme à Dieu c'est bien de constater
Qu'on a fait fausse route, qu'on s'est trompé d'idée
Mourrons pour des idées, d'accord, mais de mort lente
D'accord, mais de mort lente

Les saint jean bouche d'or qui prêchent le martyre
Le plus souvent, d'ailleurs, s'attardent ici-bas
Mourir pour des idées, c'est le cas de le dire
C'est leur raison de vivre, ils ne s'en privent pas
Dans presque tous les camps on en voit qui supplantent
Bientôt Mathusalem dans la longévité
J'en conclus qu'ils doivent se dire, en aparté
"Mourrons pour des idées, d'accord, mais de mort lente
D'accord, mais de mort lente"

Des idées réclamant le fameux sacrifice
Les sectes de tout poil en offrent des séquelles
Et la question se pose aux victimes novices
Mourir pour des idées, c'est bien beau mais lesquelles ?
Et comme toutes sont entre elles ressemblantes
Quand il les voit venir, avec leur gros drapeau
Le sage, en hésitant, tourne autour du tombeau
Mourrons pour des idées, d'accord, mais de mort lente
D'accord, mais de mort lente

Encor s'il suffisait de quelques hécatombes
Pour qu'enfin tout changeât, qu'enfin tout s'arrangeât
Depuis tant de "grands soirs" que tant de têtes tombent
Au paradis sur terre on y serait déjà
Mais l'âge d'or sans cesse est remis aux calendes
Les dieux ont toujours soif, n'en ont jamais assez
Et c'est la mort, la mort toujours recommencée
Mourrons pour des idées, d'accord, mais de mort lente
D'accord, mais de mort lente

O vous, les boutefeux, ô vous les bons apôtres
Mourez donc les premiers, nous vous cédons le pas
Mais de grâce, morbleu! laissez vivre les autres!
La vie est à peu près leur seul luxe ici bas
Car, enfin, la Camarde est assez vigilante
Elle n'a pas besoin qu'on lui tienne la faux
Plus de danse macabre autour des échafauds!
Mourrons pour des idées, d'accord, mais de mort lente
D'accord, mais de mort lente 


  • Georges Brassens chante Parapluie



Il pleuvait fort sur la grand-route,
Elle cheminait sans parapluie,
J'en avais un, volé, sans doute,
Le matin même à un ami.
Courant alors à sa rescousse,
Je lui propose un peu d'abri.
En séchant l'eau de sa frimousse,
D'un air très doux elle m'a dit « oui ».

Un p’tit coin d’ parapluie,
Contre un coin d’ paradis.
Elle avait quelque chose d'un ange,
Un p’tit coin d’ paradis,
Contre un coin d’ parapluie.
Je n’ perdais pas au change pardi !

Chemin faisant que ce fut tendre
D'ouïr à deux le chant joli
Que l'eau du ciel faisait entendre
Sur le toit de mon parapluie !

J'aurais voulu comme au déluge,
Voir sans arrêt tomber la pluie,
Pour la garder sous mon refuge,
Quarante jours, quarante nuits.

Un p’tit coin d’ parapluie,
Contre un coin d’ paradis.
Elle avait quelque chose d'un ange,
Un p’tit coin d’ paradis,
Contre un coin d’ parapluie.
Je n’ perdais pas au change pardi !

Mais bêtement, même en orage,
Les routes vont vers des pays.
Bientôt le sien fit un barrage
A l'horizon de ma folie !
Il a fallu qu'elle me quitte,
Après m'avoir dit grand merci.
Et je l'ai vue toute petite,
Partir gaiement vers mon oubli


Un p’tit coin d’ parapluie,
Contre un coin d’ paradis.
Elle avait quelque chose d'un ange,
Un p’tit coin d’ paradis,
Contre un coin d’ parapluie.
Je n’ perdais pas au change pardi !



  • Jacques Brel, Jef  



Non, Jef, t´es pas tout seul
Mais arrête de pleurer
Comme ça devant tout l’monde
Parce qu´une demi-vieille
Parce qu´une fausse blonde
T´a relaissé tomber

Non, Jef, t´es pas tout seul
Mais tu sais qu’tu m’fais honte
A sangloter comme ça
Bêtement devant tout l’monde
Parce qu´une trois quarts putain
T´a claqué dans les mains

Non, Jef, t´es pas tout seul
Mais tu fais honte à voir
Les gens se paient not’ tête
Foutons l’camp de c’trottoir
Viens, Jef, viens, viens, viens!

Viens, il me reste trois sous
On va aller s’les boire
Chez la mère Françoise
Viens, Jef, viens
Viens, il me reste trois sous
Et si c´est pas assez
Ben il m’restera l´ardoise
Puis on ira manger
Des moules et puis des frites
Des frites et puis des moules
Et du vin de Moselle
Et si t´es encore triste
On ira voir les filles
Chez la madame Andrée
Paraît qu’y en a d’nouvelles
On r’chantera comme avant
On s’ra bien tous les deux
Comme quand on était jeunes
Comme quand c´était le temps
Que j’avais d’l’argent

Non, Jef, t´es pas tout seul
Mais arrête tes grimaces
Soulève tes cent kilos
Fais bouger ta carcasse
Je sais qu’t’as le cœur gros
Mais il faut le soulever, Jef

Non Jef t´es pas tout seul
Mais arrête de sangloter
Arrête de te répandre
Arrête de répéter
Qu’t’es bon à t’ outre à l’eau
Qu’t´es bon à te pendre

Non, Jef, t´es pas tout seul
Mais c´est plus un trottoir
Ça d’vient un cinéma
Où les gens viennent te voir
Viens, Jef, allez viens, viens!

Viens, il me reste ma guitare
Je l´allumerai pour toi
Et on s’ra espagnols
Jef, viens, viens
Comme quand on était mômes
Même que j´aimais pas ça
T´imiteras l’rossignol
Jef,
Puis on s’trouvera un banc
On parlera d’l’Amérique
Où c´est qu´on va aller, tu sais
Quand on aura du fric
Jef, viens
Et si t´es encore triste
Ou rien qu’si t’en as l’air
J’te raconterai comment
Tu d’viendras Rockefeller
On s’ra bien tous les deux
On r’chantera comme avant
Comme quand on était beaux
Jef,
Comme quand c´était l’temps
D´avant qu´on soit poivrots

Allez viens Jef, viens
Ouais! Ouais, Jef, ouais, viens!

24 mars 2016

Romeo and Juliet, F. Zeffirelli (1968), W. Shakespeare (1595)


Bande-annonce : 






Distribution :


Résultat de recherche d'images pour "roméo et juliette zeffirelli"Date :  de sortie inconnue (2h 18min)
De :  Franco Zeffirelli
Avec :  Leonard Whiting, Olivia Hussey, Michael York 
Genres ;  Drame, Romance
Nationalités ;  Italien, Britannique





Extrait(s) :




Acte II, scène II

Scène du balcon


Roméo: Il se rit des plaies, celui qui n'a jamais reçu de blessures! (Juliette paraît à une fenêtre) Mais doucement! Quelle lumière jaillit par cette fenêtre? Voilà l'Orient, et Juliette est le soleil! Lève-toi, belle aurore, et tue la lune jalouse, qui déjà languit et pâlit de douleur, parce que toi, sa prêtresse, tu es plus belle qu'elle-même! Ne sois plus sa prêtresse, puisqu'elle est jalouse de toi; sa livrée de vestale est maladive et blême, et les folles seules la portent: rejette-la!... Voilà ma dame! Oh! voilà mon amour! Oh! si elle pouvait le savoir!... Que dit-elle? Rien... Elle se tait... Mais non; son regard parle, et je veux lui répondre... Ce n'est pas à moi qu'elle s'adresse. Deux des plus belles étoiles, ayant affaire ailleurs, adjurent ses yeux de vouloir bien resplendir dans leur sphère jusqu'à ce qu'elles reviennent. Ah! si les étoiles se substituaient à ses yeux, en même temps que ses yeux aux étoiles, le seul éclat de ses joues ferait pâlir la clarté des astres, comme le grand jour, une lampe; et ses yeux, du haut du ciel, darderaient une telle lumière à travers les régions aériennes, que les oiseaux chanteraient, croyant que la nuit n'est plus. Voyez comme elle appuie sa joue sur sa main! Oh! que ne suis-je le gant de cette main! Je toucherais sa joue!

Juliette: Hélas!

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Roméo: Elle parle! Oh! parle encore, ange resplendissant! Car tu rayonnes dans cette nuit, au-dessus de ma tête, comme le messager ailé du ciel, quand, aux yeux bouleversés des mortels qui se rejettent en arrière pour le contempler, il devance les nuées paresseuses et vogue sur le sein des airs! 
Juliette: Ô Roméo! Roméo! pourquoi es-tu Roméo? Renie ton père et abdique ton nom; ou, si tu ne le veux pas, jure de m'aimer, et je ne serai plus une Capulet. 
Roméo, à part: Dois-je l'écouter encore ou lui répondre? Juliette: Ton nom est mon ennemi. Tu n'es pas un Montague, tu es toi-même. Qu'est-ce qu'un Montague? Ce n'est ni une main, ni un pied, ni un bras, si un visage, ni rien qui fasse partie d'un homme... Oh! sois quelque autre nom! Qu'y a-t-il dans un nom? Ce que nous appelons une rose embaumerait autant sous un autre nom. Ainsi, quand Roméo ne s'appellerait plus Roméo, il conserverait encore les chères perfections qu'il possède... Roméo, renonce à ton nom; et, à la place de ce nom qui ne fait pas partie de toi, prends-moi tout entière. 
Roméo: Je te prends au mot! Appelle-moi seulement ton amour, et je reçois un nouveau baptême: désormais je ne suis plus Roméo. 
Juliette: Mais qui es-tu, toi qui, ainsi caché par la nuit, viens de te heurter à mon secret? 
Roméo: Je ne sais par quel nom t'indiquer qui je suis. Mon nom, sainte chérie, m'est odieux à moi-même, parce qu'il est pour toi un ennemi: si je l'avais écrit là, j'en déchirerais les lettres. 
Juliette: Mon oreille n'a pas encore aspiré cent paroles proférées par cette voix, et pourtant j,en reconnais le son. N'es-tu pas Roméo et un Montague? 
Roméo: Ni l'un ni l'autre, belle vierge si tu détestes l'un et l'autre. 
Juliette: Comment es-tu venu ici, dis-moi? et dans quel but? Les murs du jardin sont hauts et difficiles à gravir. Considère qui tu es: ce lieu est ta mort, si quelqu'un de mes parents te trouve ici. 
Roméo: J'ai escaladé ces murs sur les ailes légères de l'amour: car les limites de pierre ne sauraient arrêter l'amour, et ce que l'amour peut faire, l'amour ose le tenter; voilà pourquoi tes parents ne sont pas un obstacle pour moi. 
Juliette: S'ils te voient, ils te tueront. 
Roméo: Hélas! il y a plus de péril pour moi dans ton regard que dans vingt de leurs épées: que ton œil me sois doux, et je suis à l'épreuve de leur inimitié. 
Juliette: Je ne voudrais pas pour le monde entier qu'ils te vissent ici. 
Roméo: J'ai le manteau de la nuit pour me soustraire à leur vue. D'ailleurs, si tu ne m'aimes pas, qu'ils me trouvent ici! j'aime ma vie finie par leur haine que ma mort différée sans ton amour. 
Juliette: Quel guide as-tu donc eu pour arriver jusqu'ici? 
Roméo: L'amour. qui le premier m'a suggéré d'y venir: il m'a prêté son esprit et je lui ai prêté mes yeux. Je ne suis pas un pilote; mais, quand tu serais aussi éloignée que la vaste côte de la mer la plus lointaine, je risquerais la traversée pour atteindre pareil trésor. 
Juliette: Tu sais que le masque de la nuit est sur mon visage; sans cela, tu verrais une virginale couleur colorer ma joue, quand je songe aux paroles que tu m'as entendue dire cette nuit. Ah! je voudrais rester dans les bons usages; je voudrais, je voudrais nier ce que j'ai dit. Mais, adieu, les cérémonies! M'aimes-tu? Je suis que tu vas dire oui, et je te croirai sur parole. Ne le jure pas: tu pourrais trahir ton serment: les parjures des amoureux font, dit-on rire Jupiter... Oh! gentil Roméo, si tu m'aimes, proclame-le royalement: et si tu crois que je me laisse trop vite gagner, je froncerai le sourcil, et je serai cruelle, et je te dirai non, pour que tu me fasses la cour: autrement, rien au monde ne m'y déciderait... En vérité, beau Montague, je suis trop éprise, et tu pourrais croire ma conduite légère; mais crois-moi, gentilhomme, je me montrerai plus fidèle que celles qui savent mieux affecter la réserve. J'aurais été plus réservée, il faut que je l'avoue, si tu n'avais pas surpris, à mon insu, l'aveu passionné de mon amour: pardonne-moi donc et n'impute pas à une légèreté d'amour cette faiblesse que la nuit noire t'a permis de découvrir. 

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Roméo: Madame, je le jure par cette lune sacrée qui argente toutes ces cimes chargées de fruits!... 
Juliette: Oh! ne jure pas par la lune, l'inconstante lune dont le disque change chaque mois, de peur que ton amour ne devienne aussi instable! 
Roméo: Par quoi dois-je jurer? 
Juliette: Ne jure pas du tout; ou, si tu le veux, jure par ton gracieux être, qui est le dieu de mon idolâtrie, et je te croirai. 
Roméo: Si l'amour profond de mon coeur... 
Juliette: Ah! ne jure pas! Quoique tu fasses ma joie, je ne puis goûter cette nuit toutes les joies de notre rapprochement; il est trop brusque, trop imprévu, trop subit, trop semblable à l'éclair qui a cessé d'être avant qu'on ait pu dire: il brille!... Doux ami, bonne nuit! Ce bouton d'amour, mûri par l'haleine de l'été, pourra devenir une belle fleur, à notre prochaine entrevue... Bonne nuit, bonne nuit! Puisse le repos, puisse le calme délicieux qui est dans mon sein, arriver à ton coeur!
Roméo: Oh! vas-tu donc me laisser si peu satisfait? 
Juliette: Quelle satisfaction peux-tu obtenir cette nuit? 
Roméo: Le solennel échange de ton amour contre le mien. 
Juliette: Mon amour! je te l'ai donné avant que tu l'aies demandé. Et pourtant je voudrais qu'il fût encore à donner. 
Roméo: Voudrais-tu me le retirer? Et pour quelle raison, mon amour? 
Juliette: Rien que pour être généreuse et te le donner encore. Mais je désire un bonheur que j'ai déjà: ma libéralité est aussi illimitée que la mer, et mon amour aussi profond: plus je te donne, plus il me reste, car l'un et l'autre sont infinis. (On entend la voix de la nourrice.) J'entends du bruit dans la maison. Cher amour, adieu! J'y vais, bonne nourrice!... Doux Montague, sois fidèle. Attends un moment, je vais revenir. (Elle se retire de la fenêtre.)
Roméo: Ô céleste, céleste nuit! J'ai peur, comme il fait nuit, que tout ceci ne sois qu'un rêve, trop délicieusement flatteur pour être réel.


Romeo and Juliet, Scène du bal  


 



Paroles et traduction :


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What is a youth ? 
Quelle jeunesse ?
Impetuous fire.
Feux impétueux
What is a maid ?
Quelle servante ?
Ice and desire.
Glace et désire
The world wags on
Le monde remue.

A rose will bloom,
Une rose va fleurir
It then will fade
Pour ensuite faner
So does a youth.
Ainsi passe la jeunesse
So does the fairest maid.
Ainsi en est-il de la meilleure servante.

Comes a time when one sweet smile
Vient une époque où un sourire
Has its season for awhile
A sa saison, pour un temps
Then Love's in love with me
Puis l'Amour est amoureux de moi.

Some may think only to marry.
Certaines personnes pensent uniquement à se marier
Others will tease and tarry.
D'autres vont taquiner et s'attarder
Mine is the very best parry,
La mienne est la plus belle des parades

Cupid he rules us all.
Cupidon règne sur nous tous.

Caper the caper ; sing me the song
Capulet, chantez moi cette chanson
Death will come soon to hush us along
La mort va bientôt venir pour vous faire taire
Sweeter than honey and bitter as gall,
Plus sucré que le miel et amer comme l'humiliation
Love is the pasttime that never will pall.
L'amour est un passe-temps qui ne perd jamais de son charme
Sweeter than honey and bitter as gall,
Plus sucré que le miel et amer comme l'humiliation
Cupid he rules us all.
Cupidon reigne sur nous tous.

A rose will bloom, it then will fade.
Une rose va fleurir, pour ensuite faner
So does a youth.
Ainsi passe la jeunesse
So does the fairest maid.
Ainsi en est-il de la meilleure servante